Raconter La Flûte enchantée

 

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La popularité de La Flûte enchantée relève un peu du paradoxe. Si le dernier chef-d’œuvre de Mozart a tous les traits d’un conte de fées, il est aussi truffé de références maçonniques, très obscures en vérité, qui devraient le rendre d’un abord plutôt difficile. Ainsi le personnage de Sarastro est très énigmatique, tout autant que la pirouette dramaturgique qui le révèle bon et généreux alors que les héros ont été convaincus de sa méchanceté par la Reine de la nuit, elle-même basculant « du côté obscur de la force ». L’initiation à laquelle sont soumis Pamina et Tamino est encore un sujet d’interrogation pour le spectateur. Les épreuves sont évidemment symboliques, elles amènent les jeunes gens de l’enfance à l’âge adulte, de l’ignorance à la connaissance, mais rien n’est vraiment élucidé après que les héros les ont traversées.

 

Pourquoi, au fait, Papageno n’a-t-il pas été initié ? Parce qu’il a parlé quand on lui commandait le silence ? Ou plutôt parce que Mozart et son librettiste Schikaneder (qui était lui-même l’interprète de Papageno lors de la création) l’ont rangé dans la catégorie des êtres trop rustres pour mériter d’être dans le secret ?

 

Effectivement, beaucoup de choses lui passent au-dessus de la tête. Il ne comprend guère ce qui lui arrive, un peu comme le spectateur s’il n’a pas été lui-même initié ! C’est pourquoi nous avons choisi de présenter notre « Flûte enchantée racontée aux enfants et à tous ceux qui la découvrent pour la première fois » sous le regard naïf de l’insouciant oiseleur. Nous n’essaierons pas de mettre en scène le personnage de Sarastro, pour qui Papageno n’existe guère. En revanche, la Reine de la nuit sera bien là, ne serait-ce que pour ces vocalises qui font de ses deux airs des « tubes » inégalés. Et tous les autres personnages aussi, les trois dames, le méchant Monostatos et tous ceux qui renvoient les jeunes spectateurs à leur univers : les trois enfants – une apparition magique ! -, les deux héros, Tamino et Pamino, à peine sortis de l’adolescence, sans oublier la piquante Papagena qui fait irruption à la toute fin de l’ouvrage, pour le plus grand bonheur de Papageno. Tout un plateau de chanteurs, jeunes eux aussi, que va mettre en situation, sous la baguette de Sylvain Blassel, notre Papageno conteur, Marc Scoffoni.

 

Alain Surrans

Angers Nantes Opéra